Goutte d’eau sur pierre brûlante, 2000

François Ozon

En Allemagne, dans les années soixante-dix, Léopold séduit Franz, un jeune homme de trente ans son cadet. Il l’installe chez lui. Tout se passe bien jusqu’au jour où un petit rien provoque une divergence entre eux deux…

Tout au long de sa filmographie, François Ozon s’est ingénié à placer des séquences destinées à rappeler qu’il était un cinéaste sexuel. Une partouse ici, la visite d’une backroom par là, un dialogue salé au milieu… au risque parfois de la lourdeur (le petit poucet Jérémie Renier qui se fait enculer par l’ogre Miki Manojlovic, c’est tout de même un peu tautologique).
Alors, voir le surdoué canaille du cinéma français s’emparer de Fassbinder, cela pouvait inquiéter.
Premier bon point, il adapte une pièce de jeunesse du maître allemand et évite une confrontation fatale avec ses chef d’oeuvres.
Deuxième bon point, Ozon ne parsème pas son film d’hommages à Lola, Maria Braun ou Effie Briest, créatures dont on imagine bien qu’elles ont dû innerver sa cinéphilie mais dont l’invocation aurait relevé de la faute de goût.
Finalement, Ozon s’empare de Fassbinder pour faire du Ozon, et de la plus belle facture.
Génie du casting : Bernard Giraudeau en séducteur malveillant et Anna Thompson en princesse queer rejouent la lutte des classes amoureuse.
Pour la forme, il nous offre son bon goût musical sublime (« Träume » par Françoise Hardy) comme… son mauvais goût musical génial (« Tanze samba mit mir » par Tony Holiday).
Jusqu’aux costumes et décors à la Derrick, « Goutte d’eau sur pierre brûlante » est une fête vicieuse et viciée.
C’est un peu trop beau pour être vrai et, d’ailleurs, ça ne l’est pas vraiment.
Mais merci infiniment à François Ozon, car l’un des meilleurs films des années 2000 est signé Rainer Werner Fassbinder.

~ par 50 ans de cinéma sur 18 juin 2018.