Six degrés de séparation, 1993

Six degrees of separation

Fred Shepisi

C’est l’histoire d’un jeune homme pauvre qui va s’infiltrer chez les riches à force d’éloquence, l’histoire d’un adolescent noir qui séduit des vieux blancs.
A l’origine, le dramaturge hongrois Frigyes Karinthy a établi une théorie selon laquelle chaque être humain est relié aux autres par un maximum de 6 connexions.
La théorie a inspiré une pièce grinçante au metteur en scène new-yorkais John Guare, où la bourgeoisie américaine voit moquées ses signes extérieurs de libéralisme (au sens américain), pas très loin de la vision caustique de Tom Wolfe dans son roman « Le gauchisme de Park Avenue ».
La pièce a bien marché, aussi le cinéma s’en est-il approché.
S’ensuivra un drôle de film, d’apparence volatile, mais que l’on ne parvient pas à oublier.
La faute au subtil talent du cinéaste australien Fred Schepisi, ainsi qu’à un casting en or qui voit Donald Sutherland et Stockard Channing railler les travers de leur génération de baby-boomers ayant troqué le rêve hippie pour les stock options.
Mais, tout cela ne pouvait tenir que par la grâce de l’acteur principal, le personnage tenant de l’ange à la Capra comme du démon bunuelien.
Et la grâce est apparue sous les traits de Will Smith.
Si « 6 degrés de séparation » est un film délicieux, il le doit au « Prince de Bel-air ».
Smith n’était qu’au début de sa carrière, mais tout ce qui fera de lui une superstar était déjà là.
On peut d’ailleurs regretter que si peu de cinéastes aient pris le temps, la peine, de le filmer vraiment.
Vedette d’action qui enchaîne les méga productions testosteronées, lui-même semble oublier qu’il n’est jamais meilleurs que lorsqu’il ne fait rien. Enfin presque rien: bavarder en blaguant, balader sa longue carcasse comme si elle ne l’encombrait pas trop…
C’était justement le sujet de son premier film de cinéma : le voir se débrouiller sans argent, sans accessoires, sans relations et sans gloire pour accéder au sommet.
Et le voir irradier dans un petit film théâtral, prouve qu’il n’avait pas besoin de plus.

~ par 50 ans de cinéma sur 4 avril 2018.