Thriller, 1983

John Landis

La création de MTV aura-t-elle été une bonne chose?
Bras armé du consumérisme mondial et du soft power américain, la légende dit que Kurt Cobain s’est donné la mort pour ne plus y contempler son reflet.
Nous parlons, en même temps, d’un puit de jouissance.
A l’instar des G.I de 1945, la révolution MTV a apporté la liberté, la pop culture, mais aussi la ségrégation raciale, l’anticommunisme, l’impérialisme yankee.
Je serai prêt à pardonner pour une raison : « Thriller ».
Après avoir forcé l’entrée à l’aide de « Billy Jean », Michael Jackson fera de la chaîne son royaume.
La fusée est surpuissante et MTV va la placer en orbite : le 2 décembre 1983, des millions d’américains découvrent l’ancienne vedette des Jackson five se transformer en loup garou après avoir jerké avec des morts vivants.

Cela fait quelques années que la star nous a quitté, dans une fin de règne assez peu digne de son génie, mais le plaisir reste le même. « Thriller » c’est de la bombe.
Les historiens du rocks dissèquent l’album, qui sur le riff de Van Halen dans « Beat it » (effectivement super), qui sur le groove de « Billy Jean » (vraiment génial) ou sur la ballade avec Paul McCartney « The girl is mine » (authentiquement délicieuse)… tandis que le disque continue de planer dans les stratosphère du billboard avec ses dizaines de millions d’exemplaires vendus.
Et le plaisir reste le même.
L’ange noir et blanc joue les méchants, ouvre sa part d’ombre et tient à affirmer qu’il n’est pas un garçon comme les autres.
Pour visualiser cela, il fallait un cinéaste à la hauteur.
Quelques années plus tard, dans la vidéo de « Liberian girl », au milieu d’une foule de caméos célèbres, la caméra filme, comme par inadvertance, Steven Spielberg sur son siège de réalisateur.
On jurerait un lapsus, tant la rencontre artistique entre les 2 rois de la pop aura relevé du jeu de cache cache.
Le chanteur a toujours déclaré sa fascination pour E.T, le réalisateur le voulait en Peter Pan… pourtant, ce sera auprès d’autres représentants du nouvel Hollywood que Bambi flirtera avec le cinéma : Martin Scorsese pour le clip de « Bad » et Francis Ford Coppola pour l’animation du parc Disneyworld « Captain Eo ».
Et ce sera l’uns des cousins turbulents de Spielberg qui gravera dans le celluloïd le geste pop ultime.


Michael Jackson aime les gentils extra-terrestres mais aussi les créatures d’outre-tombe des rediffusions télévisuelles nocturnes. Il avait donc vu et aimé les mêmes films que John Landis. Mieux, il a beaucoup apprécié son dernier essai : « Le loup garou de Londres », en particulier les effets spéciaux révolutionnaires qui accompagnent la transformation de la bête.
L’affaire se fait donc avec le réalisateur Landis et le maquilleur de génie Rick Baker.
Avec le précité « Loup Garou », ce sera la plus belle oeuvre de chacun.
Nous retrouvons donc Michael en tenue schoolboy fifties se transformant en lycanthrope dans un remake blaxploitation de « I’m a teenage werewolf ». Mais le plan s’élargie et nous retrouvons le jeune homme, pop-corn en main, dans un cinéma des années 80 avec sa copine. Sur la devanture, s’étale une affiche du « Masque de la mort rouge » de Roger Corman avec Vincent Price. Après le fameux musical zombie, le vieil acteur apporte la conclusion du clip de sa voix sépulcrale Darkness falls across the land…
Durant 14 minutes, la cinéphilie de Landis joue à plein.
Pour une fois, ce n’est plus une passion honteuse de vieux geek, mais un phénomène planétaire, en rotation continue sur les écrans télévisés.
C’est aussi pour cette consécration paradoxale que l’on aime passionnément « Thriller ».

~ par 50 ans de cinéma sur 25 août 2017.

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