L’ange de la vengeance, 1982
Ms.45
Abel Ferrara
Le genre le plus infâme qui soit est la série Z d’auteur. Un film dans lequel l’ambition se transforme en prétention, où le genre et le plaisir cinégénique en découlant sont abandonnés au profit d’une glorification du génie sans filet du cinéaste. En général, les moyens, les références, les effets sont totalement disproportionnés avec le sujet (et le résultat espéré).
Avec son premier film, « Driller killer », Ferrara a frôlé la ligne fatidique avec un essai poético-gore hystérique, parfois inspiré, souvent complaisant dans lequel il incarne lui-même un serial ailler adepte du dripping à la perceuse.
Son deuxième essai appartient, quant à lui, à mon genre favori : la série B d’auteur.
Une jeune femme, violée deux fois le même jour, décide la nuit venue de parcourir les rues sombres de New York en tuant de son calibre 45 tous les hommes qui l’approchent.
Ce résumé condense toutes les mauvaises pulsions et bas instincts du cinéma d’exploitation le plus vénal. Et le métrage qui en découle offre son lot de séquences iconiques dans ce registre, avec pour point d’orgue dans les séances de minuit des années 80 : Zoé Lund associant voile de nonne, portes jarretelles et gros flingue comme un fantasme de fumetti porno.
Pourtant, dans « L’ange de la vengeance », l’ambition de l’auteur se fond dans le genre et parvient à créer de la pure cinégénie, tout en creusant ses obsessions. Ici, les moyens, les références et les effets sont parfaitement adaptés aux intentions.
Ferrara entre dans le panthéon des grands cinéastes en suivant une ligne droite, celle de la vengeance inéluctable d’une jeune femme violée. Un canevas squelettique, dégraissé de la moindre psychologie qui laisse libre cours à des ellipses abyssales entre 2 déchaînements de violence dont on ne sort pas indemne.