Max mon amour, 1986

Nagisa Oshima

Un diplomate anglais, en poste à Paris, soupçonne son épouse d‘entretenir une liaison. Il engage un détective privé et découvre qu’elle loue un appartement afin d’y entretenir ses amours avec un chimpanzé.
Une fois posé ce pitch (qui pourrait n’avoir été inventé que pour le malaise saisissant celui qui le raconte) il faut avouer que « Max, mon amour » raconte très exactement cela.
Un film coquin ou un film d’horreur (ce à quoi on peut évidemment songer au premier abord) aurait joué sur le suspens, manipulé la perception, au moins, aurait laissé patienter le spectateur voyeur avant de dévoiler la bête.
Mais nous sommes dans une histoire de gentleman, et le héros décide rapidement d’inviter le primate à son domicile, estimant plus correcte que le vaudeville se passe dans l’univers domestique.
Oshima poursuit une drôle d’histoire d’amour avec les producteurs français : après Anatole Dauman qui lui avait commandé un film érotique devenu scandale national au Japon, le cinéaste se lie avec Serge Silberman.
Ce dernier vient de produire le Bunuel dernière période, celui des fables tordues, aux comédiens triviaux et aux couleurs fades. Entre ces hommes, se glisse la plume malicieuse de Jean-Claude Carrière, lequel propose une nouvelle variation du « Charme discret de la bourgeoisie » à travers cet adultère simiesque.

« Max, mon amour » est donc un film onctueux, presque aimable (notamment grâce à la manière musicale et sans logique apparente dont les protagonistes enchaîne le français et l’anglais), dans lequel évoluent de nombreuses figures familières : Bernard Haller, Bernard-Pierre Donnadieu, Pierre Etaix, ou encore Fabrice Luchini (qui à l’époque, s’amusait à entretenir un grand écart entre « Perceval le gallois » et « Emmanuelle IV »). On pourrait ajouter la douce photo de l’aventurier Raoul Coutard, les décors de Pierre Geffroy qui réconcilient la comtesse de Ségur avec le marquis de Sade, ou encore la clarinette de Michel Portal, seule voix permettant de faire sourdre l’inquiétude de l’animal titre.
En effet, rassurons-nous, il est tout de même bien question de désir et d’angoisse.
Et le singe en est l’acteur principal. C’est même la source la plus puissante de l’Unheimlich à l’oeuvre : tout est fait pour nous laisser penser que Charlotte Rampling s’est amourachée d’un authentique animal. Le maquillage est admirable (Rick Baker est de la partie), mais forcément visible et crée un constant décalage avec la bande sonore composée de véritables cris de bête et avec un mime très étudié.
Max est donc un animal prisonnier qui aime ses geôliers. Le diplomate est un obsédé qui aimerait bien voir la scène primale mais ne parvient jamais à ses fins, malgré la création d’une cage/chambre ou le recours à une prostituée.
Oshima développe sa thématique des amours emprisonnées, que ce soit dans des geôles rurales (« Une bête à nourrir »), un camp de prisonniers «(« Furyo »), une chambre d’amants morbides (« L’empire des sens ») ou une caserne de samouraïs (« Tabou »).
L’aventure ne peut aboutir qu’à l’acceptation d’une incompréhension mutuelle.
Comme le disait Lacan : il n’y a pas de rapport sexuel.

~ par 50 ans de cinéma sur 12 mai 2017.

Une Réponse to “Max mon amour, 1986”

  1. L’armée des douze singes, max mon amour… cet attrait pour le primate me laisse singeur.

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