Gorge, coeur, ventre, 2016
Maud Alpi
Il semble que le classique de science fiction, écrit par Clifford D. Simak en 1952, innerve le cinéma d’auteur mondial. En effet, des promenades canines de « Adieu au langage » de Godard, au bien nommé « Les chiens errants » de Tsai Ming Liang, une poignée de films auraient pu s’intituler « Demain les chiens » dans les années 2010.
Concernant le premier long de Maud Alpi, la réalisatrice elle-même confirme l’influence.
Toutefois, avant d’en arriver à un plan séquence saisissant qui marque la suprématie de la bête sur l’homme, « Gorge, coeur, ventre » se doit d’ausculter la fin de l’humanité, c’est alors aussi « La colonie pénitentiaire ».
Un jeune punk travaille dans un abattoir. Il est bouvier et incarne ainsi le chaînon manquant entre le Moyen-âge et le village global techno.
Son boulot est de convoyer des boeufs qui résistent mollement au vortex du couloir qui les mène au merlin, et parfois, de rattraper un mouton évadé ne sachant que faire de la liberté qui lui tombe dessus.
Nous sommes dans le cinéma du réel, Virgil Hanrot est un vrai punk à chiens mais a dû apprendre le métier de bouvier. Il est filmé à hauteur d’homme, avec une grande délicatesse, qu’il joue avec son ami clébard ou qu’il fasse l’amour avec une routarde, mais la caméra n’oublie jamais l’univers de mort dans lequel il évolue.
Hypnotique, musicale, la mise en scène prend acte du retrait progressif de l’élément humain et abandonne donc son personnage en dehors du cadre, comme s’il s’était perdu lui même dans l’une de ses terrifiantes machines à viande dans un suicide inconscient.
Reste alors à un mammifère fidèle qui a bien connu l’espèce des singes nus, d’en invoquer la mémoire.