Dellamorte dellamore, 1995
Dellamorte dellamore
Michele Soavi
Nous aurions tout pardonné au 4e film de Soavi. Parce que c’était l’une des dernières occasions de voir un film d’horreur italien sur grand écran et que nous le savions. Lui aussi.
Soavi, c’est l’espoir déçu d’un cinéma moribond. La dernière flamme au milieu de la pluie. Beaucoup lui était demandé, après son premier opus, le très sympathique slasher « Bloody bird ». Mais, toute une cinématographie peut-elle reposer sur les épaules d’un seul homme alors que les aînés prenaient la fuite (D’Amato, Margerethi, Deodato, Lenzi…partis faire n’importe quoi à la télé) et que maîtres eux-mêmes faiblissaient (vous souvenez-vous des derniers Fulci ? ) Le problème, c’est que Michele Soavi a commencé sa carrière alors que le genre était déjà mort. Lui seul y croyait encore, personne n’a osé lui avouer la vérité : il était trop tard !
Le plus cruel fut sans doute (pour lui avant tout) d’être nommé dauphin d’un Dario Argento dictatorial. Fan du maître, Soavi se retrouve à filmer 2 de ses scénari. Probablement écrasé par son encombrant producteur, il réalise 2 séries B laborieuses (qu’Argento aurait été bien inspiré de mettre en scène lui même tant les sujets était argentiens).
Si l’on ajoute que Soavi fut, entre temps, l’assistant de Terry Gilliam durant le tournage monstre du « Baron de Münchausen », on conclura que le jeune cinéaste est tombé au champ d’honneur du cinéma de genre.
Puis, cette année 1995, sans qu’on l’attende, débarque sur quelques écrans, sans promo, bradé en programmation estivale, un super film d’horreur italien, réalisé par Michele Soavi.
Adaptation libre des fumetti de Tiziano Sclavi « Dylan Dog », « Dellamorte Dellamore » est un délire poétique et sanglant, morbide et tendre, drôle et crépusculaire. Un film dont l’accès est sans cesse mouvant, dont le cours se crée par associations d’idées. On croirait le scénario imaginé en direct par son héros, le très romantique Francesco Dellamorte campé avec classe par Ruppert Everett. Un misogyne éternellement amoureux, donc un cinéphile.
Si c’est un dernier souvenir du cinéma d’horreur italien, alors, la carte postale de l’au-delà nous touche en plein coeur (ce qui était la moindre des choses).