Obscurité / Lumière / Obscurité, 1989
Tma / Svelto / Tma
Jan Svankmajer
Dans le court métrage « Adam », les britanniques farceurs des studios Aardman proposaient une variation absurde autour de la création de l’humanité. Tentation compréhensible de la part d’artistes modelant entièrement l’univers de leurs films.
Le tchèque Svankmajer les avait précédé dans une nouvelle cinématographique tout aussi absurde mais bien plus désespérée qu’acidulée. Le titre donne la note, laissant peu d’illusion à l’amas de terre glaise qui s’humanise sous nos yeux.
Au-delà de la fable, le cinéaste s’intéresse avant tout à la matière. Sa pâte à modeler se présente pour ce qu’elle est : une masse brune et informe. Pour lui faire prendre vie, il faudra lui injecter de la chair et du sang. Qui se souvient des poissons animés et des squelettes de lapins dans « Alice », sait que l’on peut faire confiance à Svankmajer pour jouer à Frankenstein.
Et donc la forme prend, au fur et à mesure que la matière se malaxe elle-même. On notera que de la créature, ce sont les mains qui apparaissent en premier, avant les yeux et les oreilles, comme si l’artiste tenait à rappeler sa vocation de marionnettiste avant son métier de réalisateur.
La créature sortie de la matière est un homme, un pénis impérieux choisissant de s’associer à la sculpture. Adam est, après s’être construit de viande et de merde (l’un étant l’avenir de l’autre et vice versa).
Adam est, donc. A ce moment, il comprend alors qu’il est surtout à sa fin.
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